Eglise Saint-Jean

Parmi les maisons mitoyennes du quartier Saint-Jean, leurs balconnières où poussent de géraniums et de pensées, leurs mornes porches et leurs rues fréquentées seulement aux heures de relève des docks voisins, derrière une cour pavée peu lumineuse se dresse une Eglise discrète. Elle est en bois, mais les intempéries et le temps ont gonflé ses planches, rouillé ses clous et écaillé sa peinture bleue. Il n'y a pas de clocher, mais un crucifix noir sculpté sans goût.
A l'extérieur, les bancs en pierre s'érodent, mais on y voit à l'occasion le Père Pantaléon L'Estourbeillon s'y reposer lorsque les fatigues de son ministère l'invitent à la seule distraction qu'il connaisse en ce bas monde : jeter des croutons aux pigeons. D'un côté du bâtiment, des stèles commémorent quelques fidèles. Mais depuis bien longtemps, les caveaux de la paroisse sont plein comme des oeufs, et les âmes des défunts reposent au Cimetière Saint-Jean voisin.

Une plaque commémorative rappelle l'ignoble attentat dont fut victime le Père Jacques Estienne en 1869, sur le parvis de sa propre église. Sous la rouille et l'érosion, on discerne le message suivant : "Qu'outre-tombe, il se réjouisse de la défaite deSamson Cantor et des adorateurs de la Bête".